lundi, décembre 22, 2008

Kâmil al-Macht'ûb et son cheval

Al-Qazwinî, Les Merveilles de la Création, in "Chevaux et cavaliers arabes" IMA.

Nous avons vu dans un poste précédent que la vaillance de Kâmil al-Mashtub désespéra Hasanûn le Svelte et fut cause indirecte de sa mort. Il semble ici que la monture était à l'image du cavalier :
"Pour parler des chevaux, je dirai qu'il en va d'eux comme des hommes : il en est d'endurants et d'autres qui défaillent. Un exemple à propos des premiers : il y avait, dans notre armée, un KUrde nommé Kâmil al-Macht-ûb, un homme de bien, pétri de vaillance et de religion - Dieu le prenne en pitié ! Il avait un pur-sang noir, massif comme un chameau. Un jour qu'il se mesurait avec un cavalier franc, celui-ci frappa le cheval d'un coup de lance à l'endroit du collier. La bête ploya le cou sous la violence du choc et la lance sortit de la racine de l'encolure pour frapper Kâmil al-Macht'ûb à la cuisse et ressortir ensuite de l'autre côté. Mais le cheval supporta le coup sans broncher, et le cavalier de même. J'ai pu voir cette blessure que Kâmil portait à la cuisse, lorsqu'elle se fut cicatrisée et refermée : on n'en aurait pu imaginer de plus grande. Le cheval aussi survécut et put de nouveau mener Kâmil au combat. Il se mesura avec un cavalier franc, qui frappa le cheval d'un coup de lance au front et le lui creva, sans que la bête broncha. De ce coup-là aussi, elle guérit. Quand la blessure se fut refermée, on pouvait appliquer la paume de la main sur le front du cheval et la loger dans l'endroit de la blessure.

Ce cheval fut le sujet d'une anecdote plaisante. Mon frère Izz ad-Dawla Abû l-H'asan Alî - Dieu le prenne en pitié ! l'acheta à Kâmil al- Machtûb, alors qu'il était devenu lourd à la course. Puis, mon frère s'en dessaisit en règlement d'une partie de la redevance que nous devions, pour un village, à un chevalier franc de Kafart'âb. Le cheval resta chez lui un an et mourut. Le Franc nous fit réclamer le prix. Nous répondîmes qu'il l'avait acheté et monté, que le cheval était mort chez lui et qu'il était un peu fort qu'il nous en réclamât le prix. "C'est vous, nous fut-il répliqué, qui lui avez fait boire quelque chose dont il est mort au bout d'un an." Nous restâmes confondus de la sottise du Franc et de son peu d'intelligence."

Usâma Ibn Munqidh, Des Enseignements de la vie. Souvenirs d'un gentilhomme syrien du temps des Croisades, trad. André Miquel.

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