mercredi, avril 04, 2001

Ovacik

Longue excursion hier, dans la vallée de Munzur Baba. Des montagnes noires, des arbres sacrés, des sources, des rochers à voeux et des paysans qui vénèrent tout cela. Ici, ce sont vraiment des sauvages, dans le sens païen, animiste. Ce qui ne les empêche nullement d'être raffinés, bilingues ou trilingues, militants, intellectuels. Mais ils embrassent les arbres et les rochers. Il n'y a pas de monument, pas d'écriture, c'est-à-dire les deux productions du Logos gréco-sémite ou même sumérien. Ecriture, architecture, c'est le monde de la Mésopotamie, du Verbe abstrait. Ici, la religion n'est pas une construction géante, arche mentale et démesurée jetée comme un pont entre le monde et son créateur.

Leur religion est intérieure et proche d'eux. Elle vit ici, elle est de ce monde, les habite comme elle habite leur nature. Il y a quelque chose qui relève du sentiment, du non-formulé, de la possession. D'où les sema qui font monter l'extase ; la poésie seuls mots admis, car ne raisonnant pas. Voilà. Leur religion n'est pas raisonnable. Elle a la force secrète des croyances enfantines. Des rituels enfantins. "Rocher, exauce mon voeu, loups, cerfs, oiseaux, guidez-moi, arbre..." Je comprends le côté sauvage intériorisé de certains. Moi aussi, quand j'étais gosse, je donnais une âme aux arbres, avant d'être habitée par le logos.

Sinon, ce matin, c'est la la pluie, encore la pluie, quel pays !

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