mardi, janvier 14, 2014

Peut-on sauver le lac d'Urmia ?



Alors que depuis plusieurs années, scientifiques et écologistes tirent la sonnette d’alarme au sujet de l’assèchement dramatique du lac d’Urmia, situé en Iran, à cheval sur les provinces du Kurdistan et d’Azerbaïdjan occidental, la situation, déjà préoccupante en 2010 alors que 60% de son eau s’était tarie, ne n’est pas améliorée en quatre ans.
En 1995, la surface du lac était de 6100 km2, pour seulement 2 366 en août 2011. Selon Hassan Abbasnejad, le directeur général de la protection environnementale de la province d’Azerbaïdjan occidental, 85% de la surface du lac a été asséchée, et de son étendue originale il ne reste donc plus que 6%, au sud.
En 1971, le lac avait pourtant été déclaré « zone humide d’importance internationale » par la convention de Ramsar et réserve pour la biosphère par l’UNESCO en 1976. Le lac d'Urmia abrite en effet 212 espèces d’oiseaux et c’est un abri essentiel pour nombre de migrateurs, avec ses 102 îles, niches naturelles pour de nombreuses espèces animales, sédentaires ou migratrices. Y vivent aussi 41 espèces de reptiles, 7 amphibies, et 27 espèces de mammifères et c'est aussi le plus vaste habitat naturel pour l'artemia salina, un crustacé qui constitue la nourriture des flamands et d'autres oiseaux migrateurs, qui pourrait disparaître en raison de l’élévation du taux de salinité, provoquée par la concentration des eaux. 
Ce taux de salinité en hausse est aussi une catastrophe pour l’activité agricole de la région et pour la végétation en général. Sont à craindre aussi les « tempêtes de sel » que l’on voit se former autour de la mer d’Aral, causes de destructions importantes de la faune et de la flore, et aussi à l’origine de graves problèmes de santé publique, avec une recrudescence des maladies respiratoires, des cancers de la gorge et de l’œsophage, des maux affectant les yeux.
Une des causes majeures de cette mort lente du lac d’Urmia sont les barrages de plus en plus nombreux sur les cours d'eaux alimentant le lac, la construction d'une route longue de 130 km, dont une partie traverse le lac avec un pont de près d'un kilomètre et demi, ainsi qu'un barrage sur ce même lac. Les déchets industriels, longtemps incriminés, semblent finalement avoir moins d’incidences.
Pour sauver le lac, il faudrait augmenter son niveau en important de l’eau. En 2011, le président Ahmadinejad avait ainsi ordonné que 600 millions de mètres cubes d’eau du barrage d’Aras soient déversés dans le lac pour le réalimenter. Il est nécessaire aussi, selon un rapport de l’UNEP, de réduire l’agriculture d’irrigation, ce qui est rendu difficile par la forte dépendance de l’activité agricole vis-à-vis de cette source d’eau, d’autant que la croissance démographique et les tendances climatiques augmentent les besoins de toute la région.
Une autre solution serait de détourner d'autres cours d’eau afin qu’ils alimentent le lac : le Zab, l’Aras, ou l’eau de la mer Caspienne, mais cette dernière, trop éloignée, serait une solution plus onéreuse. D’ailleurs ces fleuves et la Caspienne appartiennent aussi à des États voisins (le Zab coule aussi en Turquie et en Irak, le bassin de l’Aras appartient pour moitié à l’Azerbaïdjan) et les négociations n’ont jusqu’ici pas abouti. Avoir recours à des bassins fluviaux locaux pourrait être insuffisant, même si cette solution serait moins coûteuse et moins longue à mettre en place.
Un autre moyen serait de provoquer davantage de précipitations par l’ensemencement des nuages avec des aérosols dans des nuages qui augmentent la condensation de la vapeur d’eau, mais cette technique a une action assez limitée.
Le 22 novembre 2013 s’est tenue à Berlin la première conférence internationale pour préserver ce lac  Des experts européens, américains et iraniens se sont réunis pour discuter des moyens d’enrayer la disparition de ce lac.
La problématique de la conférence était ainsi présentée :
Le lac d' Urmia, situé au nord-ouest de l’Iran, à une altitude de 1270.4 m au dessus du niveau de la mer est l’un des plus grands lacs permanents du monde et ressemble au Grand Lac salé des États-Unis à plusieurs égards, dans sa morphologie, sa chimie et ses sédiments. Le lac a été déclaré « zone humide d’importance internationale » par la convention de Ramsar en 1975 et réserve pour la biosphère par l’UNESCO en 1976. 

En raison de la construction d'une immense digue (autoroute) en 1980 au milieu du lac dUrmia, le lac est partiellement divisé en deux parties (le passage qui relie les deux parties n’est large que de 1400m). Par ailleurs, outre les barrages précédents construits avant la révolution de 1979, depuis 2000, plus de 10 barrages ont été construits sur les rivières dont les bassins se déversent dans  le lac d’Urmia. 

Plus généralement, le lac salé d’Ourmia rétrécit depuis longtemps, et a vu sa profondeur diminuer de manière significative au cours des dernières années. La salinité du lac a augmenté au cours des dernières années, pour atteindre plus de 300 g / l en 2010 et de vastes zones du lit de lac ont été desséchées. En raison de la récente baisse de l'eau du lac, il y a un réel danger pour l'avenir du lac en tant que ressource naturelle mondiale. 
Les études actuelles, géomorphologiques, hydro-chimiques, hydrologiques, hydrogéologiques, montrent une catastrophe écologique environnementale dans et autour de la zone du lac. L'état de l'eau hyper-saline conduit à une évaporation importante (de 100cm/an), qui a un impact négatif sur l'éco-système et provoque la désertification. Ceci est visible autour du lac à plusieurs endroits. 

Depuis plusieurs années, l'Iran a essayé de mettre en œuvre des mesures afin de stopper la détérioration du lac et de son éco-système, mais peu de succès ont été observés. Considérant que seule une approche fondée sur les sciences naturelles, économiques techniques et sociales peut résoudre ce problème, l'objectif principal de la conférence est de favoriser et d'encourager un débat fructueux et un échange intellectuel entre les participants. La conférence vise à élaborer un plan de gestion de sauvetage de l'eau à long terme pour le lac et la biosphère autour de la zone du lac.
 Les principales questions abordées dans la conférences sont les suivantes :
Quelle est la situation actuelle (environnementale, économique, sociale, hydrologique) du lac d’Urmia?
Quelles mesures ont déjà été étudiées et appliquées?
Quels sont les rôles des facteurs humains et – secondairement climatiques – dans l’accélération du processus d’assèchement du lac ?
Que peut-on faire pour éviter une augmentation de l’évaporation et par là une détérioration de l’éco-système du lac ?
Quelles leçons a-t-on tirées de la mer d’Aral et de la mer Morte l?
Quelles mesures alternative peuvent être prises pour stopper cette évolution et pour aider l’environnement du lac à se rétablir de lui-même ? Y a-t-il un plan directeur possible?
Peut-on définir une approche compréhensive, globale, fondée sur des objectifs urgents, à moyen et à long termes ?

Parmi les multiples interventions, on peut lire en ligne les interventions suivantes :
Prof. Dr. Siegmar W. Breckle (département d’Écologie de l'université de Bielefeld) : « From Aral Sea to Aralkum - Problems and solutions for a lost lake »  ; 
Dr. Michael Kaltofen, directeur du département de  Conseil méthodologique, DHI-WASY GmbH, Dresde, « Integrating German Iranian experience - Battle for water in Zayandeh River basin »  ; 
Dr. Massoud Bagherzadeh Karimi, Directeur général adjoint du Bureau des zones et habitats protégés, département de l'Environnement de la République islamique d'Iran : « Ecosystem approach as a main strategy for Urmia Lake Basin » ;
Raana Koushki, ministre de l'Énergie de la République islamique d'Iran : An analysis of the various factors leading to decrease in water levels of Lake Urmia  ; 
Prof. Dr. Steffen Mischke, Institut des sciences de la terre et de l’environnement, université de  Potsdam : The history of the Dead Sea and its present state  ; 
Dr. Mahdi Motagh & Dr. Sigrid Roessner, Département de géodésie et de télédétection, Helmholtz Center Potsdam, GFZ : «  Contribution of remote sensing for natural hazards assessment in Iran » ; 
Prof. Dr. Bahram Taheri, Université de technologie Amirkabir de Téhéran : A comprehensive analysis of long-term strategic dynamic rehabilitation and preservation plan for Lake Urmia.





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