lundi, janvier 17, 2011

Exécution imminente ou déjà accomplie de Hossein Khezri

Il y a deux jours, un Kurde d'Iran, Hossein Khezri, âgé de 28 ans, était probablement exécuté par pendaison dans la prison d'Ourmiah, sans que son avocat ou sa famille en aient été avertis. Il avait été condamné à mort pour appartenance au PJAK (branche iranienne du PKK)


Il avait été arrêté en 2008, accusé d'avoir participé au meurtre d'un officier de police à Ourmiah en 2005. Après deux et demi de détention, les tortures et les mauvais traitements l'avaient quasiment rendu aveugle. Il avait passé 8 mois en isolement complet, ce qui avait considérablement affecté son état psychique et l'avait amené à deux tentatives de suicide.

Dans une lettre envoyée le 7 novembre 2010 aux ONG de défense des droits de l'homme, Hossein Khezri exposait lui-même son cas et ses conditions de détention. Le 17 novembre, la Cour suprême émettait une note de service à la prison d'Ourmiah ordonnant  son exécution, tandis que son avocat se démettait du dossier dans des conditions suspectes. Le 19 novembre Amnesty International lançait un appel urgent aux autorités iraniennes en faveur de Hossein Khezri. 

 Le 6 janvier, son frère et d'autres membres de sa famille ont pu lui rendre visite à la prison d'Ourmiah et les autorités ont clairement présenté cela à la famille comme la dernière visite, leur disant qu'il allait ensuite être transféré et qu'ils le voyaient pour la dernière fois. Ses parents craignent alors une exécution imminente.

Le 13 janvier, sa famille ne peut obtenir aucune autre information. Les autorités leur disent simplement que Hossein Khezri a été envoyé à Téhéran pour l'exécution de sa sentence. Ils craignent alors qu'il n'ait été secrètement exécuté.

le 15 janvier, plusieurs sites annoncent sa mort, mais la famille n'a aucune confirmation. La rumeur court seulement qu'un prisonnier a été pendu à Ourmiah, et les mouvements kurdes nomment Hossein Khezri. Le 16 la nouvelle est reprise par les agences de presse kurdes comme peyamner.com.

Lettre de Hossein Khezri, datée du 7 novembre 2010.
Moi, Hossein Khezri, suis un prisonnier politique condamné pour activités menaçant la sécurité nationale par la 10ème Chambre du tribunal révolutionnaire d'Ourmiah. La condamnation a été confirmée par la 10ème Chambre de la cou d'appel de la province d'Azerbaïdjan occidental et par la 31 ème Chambre de la cour suprême. Je suis condamné à mort.
 Je vais essayer de montrer les méthodes utilisées durant mes interrogatoires, l'enquête et le procès, malgré les efforts de la Cour pour interdire au peuple d'Iran et à la communauté internationale toute mention de tels agissements, ainsi que leur refus de prendre en compte ma lettre ouverte au département de la Justice ; en dépit de tous leurs efforts, je vais essayer de relater au monde un peu de la situation dans laquelle je me trouve, dans l'espoir que quelqu'un entendra ma voix.
Je suis détenu depuis le 31 juillet 2008. J'ai été arrêté à Kermanshah par la branche Nabi Akram des Sepah (Gardiens de la révolution) et suis resté entre leurs mains 49 jours. Durant cette période, j'ai été soumis à de graves tortures mentales et physiques, dont ce qui suit :
1. Battu plusieurs heures, quotidiennement ;
2. Pressions psychologiques et intimidations durant les interrogatoires;
3. Menaces d'impliquer mon frère, mon beau-frère et ma familles dans des "activités illégales" contre le gouvernement ;
4. Coups de pied sur mes parties génitales, causant des saignements et une enflure pendant 14 jours ;
5. Plaie ouverte à ma jambe droite, de 8 cm de long, résultat de coups de pied durant les interrogatoires, plaie qui est toujours ouverte  ;
6. Coups violents portés sur tout le corps avec une matraque pendant 49 jours, causant des contusions et une inflammation de tout le corps ;
Selon l'article 38 de la constitution iranienne, la torture est strictement interdite pour extorquer des aveux et obliger une personne à témoigner, avouer ou prêter serment sous la contrainte est illégal, et tout résultat obtenu par de telles méthodes sont considérés comme nuls et invalides. Par ailleurs, les mêmes lois déclarent que les contrevenants doivent être poursuivis et condamnés. Maintenant, c'est la question : Qu'en est-il de cette loi ?
Comme je l'ai dit auparavant, j'ai été torturé à  Kermanshah, au centre de détention, et soumis à des pressions physiques et psychologiques. Pourquoi donc les preuves obtenues dans de telles conditions sont non seulement considérées comme recevables par la Cour, et que ce sont ces preuves là qui ont servi à me condamner si lourdement ?
J'ai été transféré de la prison des Nabi Akram Sepah de Kermanshah à celle de Sepah Al Mahdi d'Ourmiah le 18 septembre 2008.  Dans cette nouvelle prison, j'ai été soumis à des pressions psychologiques et de sévères tortures physiques. 
J'ai encore été transféré au département d'information d'Ourmiah le 6 janvier 2009 et ensuite au quartier général du ministère du Renseignement  le 15 février 2009, et à nouveau torturé. Après avoir été transféré à la prison d'Ourmiah le 11 mai 2009 j'ai comparu au tribunal pour la première et la dernière fois, à l'une des chambres du Tribunal révolutionnaire d'Ourmiah.
Le représentant du ministère du Renseignement était présent au tribunal, aux côtés du procureur d'Ourmiah. Avant le procès on m'a averti que je ne pourrai parler de la torture et qu'il ne m'était pas non plus permis de mentionner une seule des méthodes d'interrogatoire ni ce qui s'était produit durant ces séances. J'ai été aussi menacé afin que je n'indique pas que ma 'confession' avait été obtenue sous la torture.
Avec un tel climat dans ce tribunal, et aussi du fait que l'on ne m'avait donné aucun temps pour préparer une déclaration, ni assez de temps pour exposer mon cas, comment mon avocat aurait-il pu me défendre contre des accusations si graves, en moins de 10 minutes, même si j'étais innocent ?
Et voici une autre question : quel était le but de ma présence dans une telle parodie de tribunal, si ce n'est juste pour prouver que j'avais eu un 'procès' et que j'avais été 'condamné' à ce procès ?
En dépit des menaces et des pressions, j'ai déclaré au juge à la tête de la 1ère Chambre du tribunal révolutionnaire, qu'en vrai j'avais été torturée et que les aveux n'étaient pas valables puisqu'ils m'avaient été dictés par une sévère contrainte, mentale et physique. Je lui ai dit aussi qu'on m'avait averti de ne pas mentionner la torture ni de me rétracter. Hélas, il a procédé au jugement sans essayer aucunement d'enquêter  sur mes plaintes de torture et a rendu sa sentence en 10 minutes. La même sentence a été prononcée par les cours d'appel et le 8 août 2009 a été rendue définitive et l'on m'a envoyé à la prison centrale d'Ourmiah.
Je dois dire qu'entre la première sentence et la cour d'appel, je n'ai pas baissé les bras, et le 27 juillet 2009, deux semaines avant le verdict final, j'ai envoyé une plainte officielle pour traitements inhumains et illégaux au procureur général des tribunaux militaires d'Ourmiah, plainte portée au dossier le 31 décembre 2009. Le 16 février 2009, mon frère a été averti que j'avais porté plainte pour la façon dont j'avais été traité durant mes interrogatoires par les agents de renseignement de la prison d'Al-Mahdi le 7 décembre 2009 et que je voulais un examen médical officiel.
Ma plainte auprès du tribunal militaire a été portée devant les tribunaux principaux, et malgré mes plaintes au sujet du comportement des interrogateurs et des officiers de la branch Al-Mahdi des Gardiens de la révolution (Sepah), et les preuves médicales de torture que je leur ai présentées, ainsi que ma demande d'être examiné par un médecin officiel, le procureur de la 8ème Chambre n'a même pas demandé à ce que je sois soumis à un examen médical pour vérifier si je disais ou non la vérité.
Le 2 février 2009, juste après avoir envoyé ma plainte et présenté les preuves du médecin légiste, j'ai été emmené au ministère du renseignement sous escorte armée et détenu là-bas trois jours. Durant ces trois jours ils m'ont menacé au sujet de ma plainte, et m'ont demandé pour quelle raison j'osais porter plainte, et me disant que maintenant j'allais devoir être filmé et lire les aveux qu'ils avaient écrits pour moi et nier que j'avais été maltraité d'aucune manière. Ils m'ont dit que si je coopérais, ils pourraient réduire les accusations et la peine. Ces menaces sans fard, et leur essai de créer une réalité factice pour les gens, c'était comme s'ils faisaient du troc avec des vies humaines.
Quand ma famille a appris que j'avais été transféré au ministère du Renseignement, elle a été terrifiée, et alors que mon père cherchait à obtenir une quelconque information, on ne lui fournissait que des réponses confuses et contradictoires. Il a eu si peur que je puisse être exécuté qu'il eut une attaque cardiaque fatale au ministère du Renseignement et a été envoyé à l'hôpital où il est mort, ajoutant ainsi un autre chapitre aux crimes de la République islamique qui cause une telle peur aux parents d'un prisonnier politique, ce qui est pire qu'une exécution réelle. Qui répondra de tels crimes ?
20 jours ne s'étaient pas écoulés depuis la mort de mon père que j'ai été  soudain exilé à la prison de Qazvin. Vous pouvez imaginer mon état d'esprit, surtout après avoir passé des heures menotté et aveuglé sans aucune explication sur ce qui allait arriver. Après des heures dans ces conditions, ils ont mentionné, par hasard, que j'étais transféré dans une autre prison et de ne pas 'm'inquiéter'. Jusqu'à présent, personne n'a donné suite à mes plaintes ou ma demande d'être examiné par un médecin légiste et ils n'ont donné aucun motif pour leur refus de prendre en compte ma plainte.
Le 19 vril 2009, la 104ème Branche du tribunal militaire d'Ourmiah a rendu son jugement : personne, aucun représentant du Renseignement ou des Gardiens de la Révolution ne m'a expliqué quoi que ce soit ; je n'ai passé aucun examen médical et je ne sais toujours pas sur quoi se fonde ma condamnation. Un acte d'accusation émanant du ministère du Renseignement et du tribunal fait de moi, Hossein Khezri, un combattant armé. Je n'avais aucune arme quand on m'a arrêté, ma lutte était seulement politique, et je n'ai jamais porté les armes contre l'Iran. Mais j'ai passé 8 mois en isolement dans différentes cellules, de Nabi Akram à Kermanshah, Al-Mahdi et le ministère du Renseignement à Ourmiah, dans les pires conditions physiques, sauvagement torturé, humilié et constamment menacé.

Les 8 mois que j'ai passés au secret ont affecté ma condition psychique à un point tel que j'ai tenté deux fois de me tuer. Je pensais que la mort était de bienloin préférable à cette torture quotidienne et des conditions de vie si inhumaines. Comment est-il possible dans le monde d'aujourd'hui de torturer quelqu'un pendant 8 mois sans lui permettre une seule visite, ou même un contact avec un avocat, pas même par téléphone ?
En conclusion, moi, Hosseïn Khezri, suis un prisonnier politique condamné à mort et gardé au secret de sorte que quand ma lettre ouverte est parvenue au tribunal, la prison a refusé d'identifier mon nom ou mes empreintes digitales, et la lettre elle-même a été confisquée. Le moment de mon exécution ne m'a pas été révélé. Je ne sais si ce sera demain, ou le surlendemain, ou cette nuit, et je ne suis pas admis à recevoir des visites et ne peut même dire à personne que je suis toujours en vie.
C'est dans ces conditions que je demande à tous les défenseurs des droits de l'homme et aux organisations concernées par les droits de l'homme et les droits des prisonniers d'accepter ma requête et d'être ma voix pour l'humanité.
À partir de maintenant, je vous reconnais tous, officiellement, comme mes avocats et vous demande de m'aider à ce que mon dossier soit porté devant un tribunal juste et équitable, sans secret, et je répondrai ouvertement à toutes vos questions.
Enfin je demande au Commissariat de droits de l'homme des Nations Unies de bien vouloir lire, publier et se pencher sur mon dossier.
Respectueusement,
Hossein Khezri
Prisonnier politique dans les couloirs de la mort,  prison centrale d'Ourmiah, cellule 12.

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